Cher journal,
Quand on a la chance de participer à un voyage très bien organisé sur les champs de bataille de la Première Guerre mondiale, la moindre des choses est de faire l'effort d'arriver dans des conditions comparables à celles que les poilus ont pu connaître. C'est donc dans le froid des rives de la Meuse que les élèves se sont réveillés après une nuit fort reposante dans le bus. Leur yeux ensommeillés ont alors découvert un terrain bouleversé, entrecoupés de trous d'obus. Après les avoir réconforté, leurs officiers chevronnés les ont ensuite conduit jusqu'au fort de Douaumont, théâtre de violents affrontements dans la bataille de Verdun en 1916. A quelques centaines de mètres, l'ossuaire et la nécropole de Douaumont leur ont permis de prendre la mesure de la mort de masse et de marcher dans les pas des chefs d'Etat qui ont scellé la réconciliation franco-allemande en ces lieux. Les élèves ayant refusé de déjeuner avant 14h, nous dûmes céder à leur mutinerie : "s'il vous plait, Monsieur, dites-nous ce qui nous attend ?"
Pas avant le ravitaillement, insistons-nous. Nous avons donc pris notre repas au pied de la butte de Vauquois, colline marquée par la guerre des mines. Nous avons enfin découvert la première ligne dans les tranchées de la Main de Massiges. Les élèves ont alors pu marcher dans les pas de leurs ancêtres, entrer dans leurs abris et comprendre leur vie quotidienne. Que leurs proches à l'arrière se rassurent : après la relève, ils ne présentaient ni poux, ni morsures de rats et aucun n'avait été touché par des éclats d'obus en dépit de la "gueule cassée" de certains d'entre eux (liée probablement au manque de sommeil). Installés dans les cantonnements, à Epernay, ils se reposent en attendant de monter au Chemin des Dames... "C'est à Craonne, sur le plateau, qu'on va laisser notre peau..." dit la chanson. Mais c'est vrai que c'était il y a cent ans. On verra bien.
Bonne nuit à tous les embusqués de Nailloux ou d'ailleurs,
Lieutenant-Colonel Kaminski au rapport